Le registre de langue des personnages, partie 2

Comment écrire le registre de langue d’un personnage? J’explore avec toi différents aspects du langage qui sont liés à un statut social, oui, mais aussi à une émotivité. Lorsqu’un personnage prend la parole, ou lorsque le texte narratif est la pensée de celui-ci, il est naturel et vraisemblable que son registre fluctue. Au-delà de ces tics de langage et de son éducation, découvre comment tu peux jouer encore un peu plus sur sa façon de s’exprimer.

Un seul registre pour ton personnage?

Quand on veut simplifier, il suffit de faire parler un personnage éduqué avec beaucoup de finesse et un gueux avec beaucoup de vulgarité. Si par contre, tu recherches plus de réalisme et de vraisemblance, les personnages devraient être capables de passer d’un registre à l’autre, avec plus ou moins d’habileté. Pourquoi? Parce que nous le faisons tous.

Article précédent: Le registre de langue des personnages, partie 1

On ne parle pas au bar comme en conférence; on ne parle pas à une nouvelle belle-mère comme à sa petite sœur. Une personne qui utilise un registre soigné à la taverne… parle mal. Je m’explique: la notion de mal parler est souvent associée à la mauvaise maitrise du registre soigné. Cependant, la maitrise du registre familier est aussi une habileté.

Ce qui est la véritable adresse est de savoir maitriser tout l’éventail des registres et de l’appliquer à la bonne situation. On parle alors de degré de formalité. Plus une situation est formelle, plus elle demande un registre soigné, tout comme elle exige des vêtements, une posture, une hygiène adaptés, etc. Et l’inverse est aussi une pirouette linguistique, vestimentaire, gestuelle…

Je doute qu’un personnage bien éduqué en lettres et en sciences parle comme les grands poètes d’antant dans la passion amoureuse la plus bestiale. Ça ne se tient pas. Ou alors, quelque chose détonne avec le personnage qui peut être mis en exergue ainsi.

Les préjugés qui viennent avec le registre vont dans les deux sens. Lorsque l’on dit qu’un registre transporte des marqueurs sociaux, ça n’est pas à sens unique. On peut être jugé comme rustre, mais aussi comme fendant, être perçu comme sophistiqué, mais aussi comme sublime.

Le registre, un marqueur émotif

Le changement de registre peut marquer aussi un changement émotif, une détente ou au contraire un stress nouveau. Le passage du vouvoiement au tutoiement est un exemple de décontraction: les protagonistes se permettent d’être plus familiers, plus détendus et plus proches. L’inverse peut mettre en évidence une distanciation, mais aussi un grand respect. Vouvoyer par défaut la reine n’a pas le même impacte que de vouvoyer son élève qui passe maitre.

Par exemple, j’ai un personnage qui tutoie tout le monde, peu importe son statut social. C’est pour elle une marque d’affection; elle les tient près de son coeur. Cependant, lorsqu’elle vouvoie quelqu’un, c’est par dédain, par volonté de mettre une distance froide entre elle et l’autre. C’est une manière de réduire l’autre. Les normes sociales n’ont pas à suivre à la lettre ce que doit être tel ou tel registre, ou politesse, tout dépend du contexte que tu y donneras.

Ok, ce graphique est un peu gauche. Je veux simplement démontrer que plus l’émotivité est élevée, moins la maitrise du langage est performante. Le graphique en lui-même est sublime; c’est mon garçon qui l’a fait et moi j’ai mis les mots.

Le changement émotif se traduit régulièrement du langage soigné vers le familier. Les cris du cœur viennent souvent plus des tripes que de la tête. Le contraste, d’ailleurs, peut être encore plus révélateur si la distance des registres est immense. L’orateur qui poétise à un haut niveau de sophistication et qui, pour une raison de ton intrigue, se met à rager avec la plus crue des vulgarités exprime une commutation majeure dans son état d’esprit. Sa colère semble par ce fait beaucoup plus intense, car il en perd ses moyens.

À l’inverse, que penser d’un personnage qui, avec des mots intimes de l’amour bien en bouche, finit par avoir un discours très soutenu, très appliqué? Y a-t-il en cour un décrochage à l’état de sensualité? Pourquoi, comment ton intrigue peut-elle passer par là?

Comment peux-tu écrire le registre de langue de ton personnage à partir de ses émotions? Tu as des exemples? Dis-moi en commentaire quelles situations particulières font changer le discours de ton personnage!

Troisième et dernière partie prochainement

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