Création de mots avec la phonétique combinatoire, partie 1

Je propose d’utiliser les phénomènes de la phonétique combinatoire pour la création de mots nouveaux, que ce soit pour de la fiction, de la traduction (de fiction) ou pour nommer un nouveau concept encore inconnu.

Définition de la phonétique combinatoire

La phonétique combinatoire est l’étude de l’interaction des sons les uns sur les autres. Il s’agit donc d’étudier les sons d’un langage (phonétique) et voir comment ils s’affectent mutuellement dans l’entourage d’un énoncé (combinaison). Cette approche est souvent utilisée dans l’étude de l’évolution des langues, mais aussi dans l’analyse du discours actuel.

Pourquoi cette discipline est intéressante pour la création de mots en fiction? Parce que tout ce qui est linguistique est passionnant (!), mais pas que. La phonétique combinatoire permet de mieux comprendre l’évolution naturelle d’une langue.

Cette compréhension peut aboutir sur des nouveaux mots d’une saveur futuriste en science-fiction, par exemple. De jouer avec les effets de la phonétique combinatoire permet de donner des nouvelles formes à des mots connus pour des concepts nouveaux, mais similaires. Ça permet également de reculer dans le temps si on décortique à l’envers l’effet de la phonétique combinatoire, par exemple si on écrit de la fantasy, voire de l’historique très ancien.

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L’outil de la phonétique combinatoire peut donc être utilisé à partir d’une langue connue (moderne ou ancienne), mais également d’une langue fictive. Si on songe seulement à expliquer la langue ancienne d’un univers fictif contre la langue moderne de celui-ci, ces techniques peuvent être fort pratiques, par exemple.

Dans ce premier volet, sur quatre, il sera question de l’assimilation et son complémentaire, la dilation.

Assimilation

L’assimilation est le phénomène par lequel un son tend, du fait de sa proximité par rapport à un autre, à devenir identique, ou à prendre certaines de ses caractéristiques. En gros, un son influence son voisin immédiat, que se soit sur la caractéristique sourde/sonore (voisement), la nasalisation, l’occlusion, etc.

Rien de mieux que l’exemple pour comprendre. Dans le mot pendant, le /d/ central est entouré du son /ã/, une nasale. Il arrive, plus fréquemment que l’on croit, que pendant soit prononcé effectivement /pãnã/, que le /d/ se nasalise sous l’influence du double /ã/. L’influence n’est pas toujours double. Comme avec le mot absent, le /s/ est sourd et assourdi bien souvent le /b/ en /p/, ayant pour résultat de dire /apsã/.

Dilation

Comme pour l’assimilation, la dilation est la modification d’un son due à l’anticipation d’un autre son, mais cette fois, il n’est pas contigu, directement voisin. Cette influence peut se faire sentir à quelques sons de distance, si on veut.

Dans le mot surtout, cette fois-ci, c’est le /y/ qui se coule dans la même sonorité que le /u/. Au lieu de prononcer /syrtu/ (surtou), par une sorte d’anticipation on le prononcera /surtu/ (sourtou). Il y a entre ces deux voyelles la consonne t qui normalement les coupe, mais pas toujours suffisamment. Pareil pour l’exemple de définition; /definisjɔ̃/ qui devient /defenisjɔ̃/ (défénition).

Le prochain volet portera sur le phénomène de différenciation.

On peut penser à des mots comme cheveux, qui est dit /ʃfø/, ce qui pourrait fournir un nouveau radical duquel découlerait toute une série de nouveaux mots de la même famille. Chefelaire, cheflu, échefelet, etc. L’imagination est la limite, comme on dit.

Que pourraient bien vouloir dire ces mots? Comment crées-tu tes nouveaux mots? Est-ce que ce genre d’outils te donne des idées pour en façonner d’autres?

Photo à la une: Mike Petrucci