L'amour est une révolte
Le roman de Fantasy de moeurs, Dissidents, est l’émancipation par des luttes non violentes d’une nation politiquement neutre coincée entre deux États belligérants. Cette histoire est vécue par Merime, jeune veuve au conseil de Narbrocque; Miliac, homme intègre dévoué auprès des gens; Vièle, guerrière qui apprend à connaitre sa sensibilité; puis Loec, forgeron sans famille en quête d’attachement.
«Si vous n’êtes pas avec nous, vous êtes contre nous». Dans Dissidents, la réponse est: «non, nous sommes sans vous». Si la position plus centrale des protagonistes dévie de la réaction attendue devant un conflit, c’est-à-dire prendre la position opposée, c’est avec autant de nuance de gris qu’elle est explorée. Est-elle meilleure? Qui sait, mais elle est différente. Dans ce projet littéraire, ce qui fait la force de l’histoire, c’est sa diversité à plusieurs niveaux.
Extrait
Merime se demande si les murmures de la forte-place la réconfortent encore. Ce qui siffle dans les fissures du roc de sa montagne, les trous d’aération et les passages entre chaque pièce creusée lui demeure familier. Est-ce suffisant? Pour aimer l’endroit à nouveau. Pour être chez soi. Chaque petite caverne équarrie à la main, de Bord-Loppe, essouffle l’air comme une flute triste.
Et ce lui semble froid. Merime caresse le grain du bois d’une table. Si usé. Comme si tous ces chants désaccordés l’avaient érodés pendant son absence de quelques années. Seulement quelques-unes, si peu et tant à la fois. Le temps de vivre avec Luölvic, d’avoir deux enfants, de les voir grandir. Ilissia a déjà neuf ans; Féli frôle les six ans. Cette table dans la cuisine près d’un grand four est plus vieille que Merime elle-même. Elle a tourné autour, enfant.
Une saga avec quatre personnages
Merime à Staël de Sanglefroy
Merime prend ses devoirs à cœur. Elle a énormément de volonté dans ses fonctions, mais aussi dans ses relations. Elle ne s’engage pas facilement, mais elle ne change que peu d’avis une fois lancé. C’est pourquoi elle prend le temps de tout soupeser. Elle établit des relations très intimes et chaleureuses, mais avec ses proches très proches seulement. Merime s’exprime peu, pourtant elle n’est pas insensible pour autant. Elle ne sait pas comment s’exprimer; elle ignore comment comprendre les émotions qu’elle vit, n’ayant jamais appris. Elle est une femme de peu de mots, mais chacun est concis, sans jeu, sans flafla, et très factuel.
Miliac à Jayen de la Narse
Miliac est idéaliste, humaniste, et ces actions doivent le mener vers ce rêve pour sa santé mentale. Éduqué dans l’amour, le respect et la coopération, Miliac tente de recréer dans le monde cette même façon de vivre. Il est confiant dans ses relations. Il sait que tous n’ont pas cette vision, mais il s’efforce, à son échelle, de semer les premiers pas vers cette route. C’est sa manière de se sentir utile. Miliac est un pont entre les gens, entre les communautés. Il n’est pas de ceux qui aiment bâtir des murs.
Vièle Bjern Darctier
Sa franchise est déroutante et exemplaire. Elle dit ce qu’elle pense et ressent, sans trop se soucier de ce que les autres vont penser. Vièle a un langage très cru, souvent grossier, mais qui exprime rarement de la réelle méchanceté. Elle est vive, énergique, elle cherche plus à bouger qu’à réfléchir trop longtemps. Elle n’en est pas moins intelligente; elle voit les choses d’une simplicité désarmante. Vièle est énormément sensible et elle apprend à en faire sa force dans ses combats et son choix de vie martiale, plutôt que de le vivre comme un handicap. Elle dit ce qu’elle pense et pense ce qu’elle dit et tant pis si ça fait chier les autres.
Loec Colbarde Fesbré
Introverti, parfois timide, mais pas tant, il aime juste écouter et converser sur des sujets plus profonds que l’ordinaire. Il a, par contre, en grand besoin de connexion et de garder ses proches. Ça peut parfois le rendre lourd tellement il ne veut perdre personne. Loec est artisan et beaucoup dans la réflexion et l’observation. Sa passivité apparente est mise à l’épreuve lorsque les événements changent trop et qu’il doit s’adapter malgré lui.
Une saga en 4 tomes
I. Déferlement
La première vague de la saga est annonciatrice d’un grand bouleversement. Autour des personnages se ressent une pression venant de peuples voisins qui sont à couteau tiré depuis des décennies. Traditionnellement, leur nation Narbrocque pratique la médiation entre ces vieux antagonistes, mais cette position s’effrite à vue d’œil. On cherche alors à solidifier Narbrocque par une alliance politique afin de n’être ni obligé de prendre parti dans ces conflits extérieurs ni être le terrain de la dévastation à venir. Dans ce tome, l’inévitable s’en vient, mais il est toujours temps d’agir au mieux.
II. Jusqu'à l'amer
La deuxième vague met à l’épreuve les alliances et les amitiés établies du tome précédent. Les positions de force ont basculé, les protagonistes se retrouvent dans une nation qui peine à maintenir des assaillants hors d’elle. À l’interne, des insurrections menacent d’éclater. Même entre personnages, les liens se fragilisent plus qu’ils ne se tissent. Réparer le maillage entre eux demandera humilité et compréhension mutuelle.
III. De sel
La vague suivante érode ce que les personnages croient savoir d’eux-mêmes. Ce n’est qu’une fois face à leur plus grande vulnérabilité qu’ils accepteront leurs multiples facettes. Le revirement politique au profit d’un nouvel antagoniste change encore la donne et les protagonistes arrivent à leur saturation de ce jeu inlassable. Cette fois, l’Histoire doit changer et cesser de se répéter.
IV. Contremarée
C’est la dernière vague qui rebrousse la marée antagoniste une fois pour toutes. Les personnages, au sommet de leur art, se lancent le défi de faire de leurs opposants un allié. En aidant chez ces derniers des groupes ostracisés, les protagonistes renforcent leur position. Par le nombre et par la déroutante nonviolence, les jeux de dominance habituelle perdent leurs piliers et finalement leur emprise.
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien.